Une classe de troisième cycle au primaire, ça évolue au gré des saisons...
L'été
Les frimousses entrent en classe, bien intrigués par le nouveau personnage devant eux. Ils le regardent, le dévisagent, avancent d'un pas vers lui et reculent de deux. Certains se collent et d'autres se méfient. Ils cherchent à le connaître et à se faire reconnaître de lui le plus rapidement possible. Les masques sont bien en places, de part et d'autres, le spectacle commence à peine.
Les efforts sont toujours au rendez-vous lors des premiers travaux scolaires. Les élèves, motivés par le nouveau départ qui s'offre à eux, se font des promesses qu'ils ne tiendront pas, bien souvent.
Le climat s'installe tout doucement, chacun en observation. L'heure des mises à l'épreuve n'est pas encore arrivée. C'est le respect mutuel avec quelques étincelles, certaines dans les yeux, d'autres dans la bouche.
L'automne
Alors que les feuilles tombent à l'extérieur, les carapaces en font de même à l'intérieur. Les caractères s'affirment de plus en plus, . L'enseignant commence à cimenter l'image qu'il a de chacun d'entre eux dans sa tête, alors que le sol gèle à l'extérieur. Il les avait imaginé grands et forts, il les découvre grands et petits, forts et faibles.
Le climat évolue, pour le meilleur et pour le pire. Les habitudes s'installent, bonnes et mauvaises. Les bourrasques commencent à entrer dans la classe, venant faire frémir les plus fragiles au passage. Certains élèves décrochent déjà et commence le réel travail de l'enseignant: ne pas ramasser les feuilles mais les recoller aux branches.
L'hiver
Il fait froid partout. Le soleil disparaît pendant de longues périodes, à l'intérieur comme à l'extérieur. Les flocons excitent les élèves et fatiguent l'enseignant. Tout ce qui avait été cultivé depuis le début de l'année disparaît lentement. Situation temporaire ou permanente?
Le climat est souvent orageux. Des tornades en plein hiver? Oui, dans une classe de sixième année, elles sont fréquentes. Les relations se redéfinissent, se réinventent au gré des coups de tête et des coups de coeur. L'enseignant n'y échappe pas. Ses élèves ont autant besoin de lui qu'ils le repoussent, semblant lui dire: "Un capitaine, ça dirige un navire mais ça ne joue pas aux cartes avec les matelôts. Allez, dans ta cabine!"
Le printemps
La fin de l'année approche et les examens sont à nos portes. Le jeu de la séduction entre les élèves va bon train et vient tout calmer sur son passage. Le secondaire arrive et les efforts se multiplient.
Le climat est plus serein. L'enseignant et son groupe n'ont plus rien à apprendre l'un sur l'autre, sur la façon d'exciter ou de calmer. La discipline est surtout relationnelle. Beaucoup moins de bruit, plus de calme, plus de regards complices, moins de supplices. Entre eux, toujours des yeux fous, mais surtout des yeux doux.
L'été
Elle revient, porteuse de rêves de vacances. Il fait chaud à l'extérieur et dans les coeurs. Et quand l'enseignant ouvre la porte de l'école une dernière fois, c'est une année de sa vie qui s'en va avec les élèves. Et pendant un instant, il se souviendra de l'automne avec un pincement au coeur, un sentiment de bien-être dans les yeux. L'instant d'après, il ira retrouver sa douce et ses deux fillettes pour réinventer le monde, l'instant d'une saison.
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4 commentaires:
J'aurais voulu écrire un texte de ce genre. C'est touchant de vérité et ça me rappelle pourquoi j'aime tant les "grands" du primaire.
Ah!!! Ce n'était pas du tout le moment pour moi de lire ce texte! Je vais faire comme si je ne l'avais pas lu, ok? :o) (Peut-être que tu comprendras mon commentaire si je me décide à terminer le billet que j'ai commencé depuis belle lurette!)
Ceci étant mis de côté, c'est un magnifique texte, criant de vérité. Il m'a touchée...
Merci Marie-Andrée et Gooba. Ça me rassure un peu je vous avoue de savoir que je ne suis pas le seul à vivre ces montagnes russes avec mes "hormoadolescents".
mes élèves de cet âge en ce moment sont tellement partagés entre : "je me rebelle" "je me fais pardonner", surtout mes filles qui, avec les spécialistes et les suppléants ne donnent pas leur place!
Et puis, devant moi, elles baissent les yeux.
Drôle d'âge. Je n'y retournerais pas.
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