dimanche 29 mai 2011

Discussion avec un merle




Ce matin, un oiseau s'est posé sur la clôture de bois qui entoure mon terrain et il a fait "PIT! PIT!". Pour des oreilles de non-initiés, je suis certain que ça aurait ressemblé à un appel à la femelle ou à un signal d'alerte mais pas à mes oreilles, non, non... En vérité, il m'a dit:

Ensaignant, je sais que l'été tarde à se montrer le bout du bec mais tu te dois de donner signe de vie. L'année scolaire tire à sa fin comme quand je vois un ver de terre et que je le tire à ma faim et tu n'as presque rien écrit sur tes élèves. Tu n'as vraiment pas de classe et tu sais comment on nomme un enseignant pas de classe? Un suppléant...

Un peu surpris par le sens de l'humour de ce merle, je le laissai siffloter d'autres vérités à mes oreilles.

Quoi? Tu pensais vraiment que j'allais laisser tes billets plein d'appitoiement et de larmes mal séchées devenir les derniers mots que tu écrirais ici? Tiens toi droit comme une règle, comme un mètre, comme un maître et agis en conséquence.



Ouais mais le groupe est difficile et la pitié est un peu comme devenue ma spécialité, mon cher pinson.



Mais apprend à cultiver le déni comme je prépare des nids, avec passion et bordel (excuse PMT, tu es loin d'être un serin...), dis à ton lectorat comment tu as réussi à survivre à cette année de merde. Comment à travers les suspensions, les signalements à la D.P.J., les P.I.A., les interventions en classe pendant que la majorité SILENCIEUSE te regardait comme ils avaient regardé tous les enseignants venus avant, tu as quand même réussi à les contrôler.



Contrôler, mince exploit pour quelqu'un former à éduquer.



Moi en tout cas, je suis fier de toi et j'ai trouvé que tu avais le flegme de ceux qui réussissent et qui font réussir, même si les résultats te seront étrangers. Même que si tu étais une femelle, je te donnerais bien trois ou quatre petits coups les ailes battantes, mon cochon!



C'est exactement là que j'ai décroché.



p.s. Drew, il est pour toi celui-là, pour te donner signe de vie avec un punch comme tu les aimes. Je t'embrasse.




lundi 4 avril 2011

Comme une girouette

Encore une fois le goût d'aller voir ailleurs si je m'y trouve. Toujours pris entre cette impression de me répéter et le désir de me réinventer. Ça devient pathétique. Le milieu dans lequel j'enseigne a raison de moi à petit feu. Avant eux, je me sentais un professeur charismatique, motivant qui savait allumer même les élèves les plus éteints. Il me suffisait d'apercevoir un brasier et WOOOFFFF! Ça prenait. Pas cette année. Ils sont là à me bailler en plein visage, à dessiner durant plus longtemps qu'un cours d'art plastique, à se la jouer sans réaliser qu'ils se paient ma tête par le fait même. Pauvreté québécoise de souche qui me donne le goût d'aller à la rencontre de l'autre pauvreté. Celle des ethnies qui sont prêts à tous les sacrifices pour améliorer le sort de leur progéniture, pour empêcher de leur léguer leurs peines et leur désarroi en héritage. Tout le contraire de la moitié des parents de ma classe cette année, qui voit l'école comme un mal nécessaire, un lieu de torture où ils ont souffert eux-mêmes trop longtemps. Je suis aigri à ce point. C'est clair, le quartier est entrain de m'éteindre. Mais bon, si tout se passe comme prévu, je resterai en place. Peur d'affronter l'inconnu une fois de plus. Peur des efforts que je dois donner pour refaire ma place. Peur de beaucoup trop de trucs qui ne m'ont jamais tué. Mais peut-être, après tout, peur de me retrouver face à moi-même, au bout du chemin.

mardi 11 janvier 2011

On est loin d'un K.O.

Dans l'annonce de la deuxième partie du documentaire sur la tournée de notre Céline nationale, elle annonce à Muhammed Ali, atteint de Parkinson sévère:

"I don't feel so well...", la voix chevrotante.

Un peu comme se plaindre à Lucien Bouchard qu'on a des fourmis dans nos deux pieds...

lundi 10 janvier 2011

It's oh, so quiet

J'aime le retour de vacances. Assis dans ma classe, calme. Bon, elle ressemble un peu à un champ de bataille because l'échange de cadeaux du 23 mais tout est calme. J'entends même le bruit des néons, c'est tout dire.

Mon corps est bel et bien assis à mon bureau mais mon esprit est ailleurs. Dans un monde rempli de rires d'enfants et de chatouillis. Il y a aussi un Blondinette et ses calins. Et plusieurs coupes de vin. Mais surtout, un calme intérieur où mon esprit divague dans cette mer dévaguée.

Que me réserve 2011? L'équilibre tant recherché? De nouveaux défis?

À l'aube de la quarantaine, je me rends compte que j'ai encore tant à me dire, encore du temps pour me refaire. Pas me réinventer mais simplement apprendre à respirer, me laisser le temps de grandir encore un peu. Laisser cette sensibilité et ce perfectionnisme de côté et sauter à pieds joints dans la société avec ce qu'elle a à m'offrir de mieux et de pire. Et ne pas juger. Et accepter.

Je vous souhaite une année où règneront l'amour et la simplicité. Et le plus souvent, les deux mélangés ensemble. Et surtout, merci de revenir ici dans mon désert et d'attendre les averses de mots, même si elles se font rares.

Car vous faites aussi partie de mon équilibre, même si je viens vers vous moins souvent...

jeudi 30 décembre 2010

Entre deux...

Je suis sorti sur le balcon ce matin, comme à tous les matins, pas un son. Il y avait bien un écureuil qui me regardait, le bedon bien rempli. C'est un avantage de mon quartier anglo. Les poubelles sont profitables pour sa race, s'il réussit à tasser les boîtes de carton et les emballages de plastique qui s'y trouvent.

Quatre jours à me reposer maintenant, à me taper des siestes à chaque après-midi et à me coucher tôt le soir finalement arrivé. Jamais connu ça en quinze ans de carrière. Fatigué, souvent. Mais exténué, jamais. On dirait une côte à remonter en skate, les deux bras battant l'asphalte de chaque côté.

Ici, c'était trop calme depuis un bout. Plus le temps et quand le temps y était, pas le goût de me répandre en quelques mots lamentatifs aérés de quelques virgules inquiètes pour mon avenir. Ma caverne était confortable. J'y avais même installé des affiches de Samantha Fox en wet t-shirt...

Mais maintenant, je suis prêt. Pas vraiment plus de temps mais plus le goût. On verra bien où ça va nous mener.

Quelques nouvelles éparses (épaisses):
  • Deux éditeurs ont reçu mon manuscrit à la mi-novembre. Une bouteille lancée à la mer, en espérant qu'ils la garderont plutôt que de la remettre aux flots.
  • J'ai regardé "Mange, Prie, Aime" hier soir avec Blondinette. Inspirant. Surtout le gros barbu italien. Je ne sais pas pourquoi mais surtout le gros barbu italien.
  • Entendu à la sortie du Casino: "Oui, je suis dans mon auto. J'arrête chez Ginette et j'arrive!". Le problème, c'est que la grosse madame, elle est rentrée à l'intérieur et a recommencé à jouer. Peut-être qu'elle se pensait réellement dans son auto. Elle devait trouver le traffic bruyant un tout p'tit peu.
  • Je crois que le I.G.A. a sorti ses emballeurs du Temps des Fêtes. Une seule vitesse. Disons que si j'étais une femme, que si j'étais motivée, je ne les prendrais pas pour courir le Rallye des Gazelles.
  • Il n'y a rien à faire, je déteste l'hiver. Au début, je pensais que c'était parce que je n'étais pas bien habillé et je me suis acheté une tuque, un cache-cou, des bottes et tout le tralala mais rien n'a changé. Ensuite, je me suis dit que c'était parce que je ne me jetais pas suffisamment dans la neige avec les enfants et je l'ai fait et je n'ai pas aimé. Je dois me rendre à l'évidence, je suis un ours frustré de ne pouvoir hiberner.
  • À ne pas faire: boire un peu, beaucoup d'alcool, prendre trois cafés à dix heures du soir et ne pas dormir avant 3h30 du matin avec trois enfants excités qui se lèvent tôt le matin de Noël. Ça fait de bizarres de photos, j'vous dis.
  • Pas profité du Boxing Day une fois de plus. Si jamais je me retrouve dans un magasin avec des dizaines d'autres consommateurs motivés, vous comprendrez dans le Journal de Montréal la raison de cet appelation, Boxing Day. Avec ma photo et une série de numéros en prime.

Bon réveillon, là!

mardi 19 octobre 2010

Les p'tits gars

J'aimerais vous dire que les médias exagèrent la situation de nos ti-culs dans les écoles primaires mais ce n'est pas le cas. J'aimerais vous dire que le fait d'être un homme et du même coup, un modèle malgré moi fait des miracles mais non. À moins de célébrer les petits miracles. Et on est loin du Saint-Frère André (!?!).

Mes p'tits poqués de cette année ne sont pas tellement différents de mes p'tits maganés de l'an passé et c'est là le drame. Il y a environ cinq ans et là, j'insiste sur le "environ" car je n'ai pas le moindre souvenir de l'arrivée de cette nouvelle évolution du mâle, j'ai perçu LA différence. Avant, dans une autre vie, les poqués arrivaient en petits paquets. Trois ou quatre et la tâche s'alourdissait. La tactique était alors très simple. Trouver le leader de ce petit groupe, le motiver en concentrant toutes ses énergies sur lui et souhaiter que les autres suivent le pas. Et ça fonctionnait souvent. Parfois.

Depuis quelques années, la "batch" a grossi. Comme une grappe de raisin shootée, ils sont devenus plus nombreux. Ils forment maintenant la normalité et c'est là que ça devient inquiétant.

Les causes? Name it. L'image véhiculée par leurs idoles, les jeux vidéos, les pères absents, le réchauffement climatique, le 11 septembre 2001, la fin de Virginie... Pick your poison.

Les solutions? Je les cherche encore, même si je m'éloigne de plus en plus de leur génération et du même coup, même si je pénètre toujours plus profondément dans le jugement et les excuses toutes faites.

Le Québec, champion du monde du suicide chez ses jeunes garçons? S'attaquer à ce problème, voilà ce que Pauline-la-pas-fine devrait faire si elle est élue.

Car parfois, je crois que ce n'est pas d'un homme qu'ils ont besoin dans leur classe. Mais plutôt d'une grand-mère juste assez rock'n'roll pour les comprendre et les aimer comme ils sont, entre un bol de soupe et un bec en pincettes.

Janette, une carrière en enseignement, ça te dit?

vendredi 17 septembre 2010

Anaïs

Je te le jure que tu l'aurais aimé, celui-là. Imagine, 13 ans, toujours au primaire, sous-scolarisé dans son pays natal, quelque part en Afrique. Lequel? Toi, tu l'aurais su...

J'imagine sa famille. Des parents se foutant de lui, peut-être trop occupés à leur quotidien. Lui, s'occupant de ses soeurs et de ses frères plus jeunes. Combien de frères? Combien de soeurs? Toi, tu l'aurais su...

Les devoirs, les leçons, que je déguise sous le terme "étude" pour ne pas trop l'effrayer, il s'en fout complètement. Je lui ai demandé pourquoi. Il m'a répondu par un hochement d'épaules, honnête comme pas un. Que voulait-il dire? Toi, tu l'aurais su...

Tu l'aurais tout de suite aimé, caméra ou pas. Tu l'aurais pris sous ton aile, sous les ailes de ton tatou. Et tu aurais réussi à percer ce mur, le contournant comme tu l'as si bien réussi à de nombreuses occasions, parce que tu as compris que ton rôle était de flatter, de construire et non pas de détruire...

Tu sais quoi, un peu à cause de toi et de ces images qui t'appartiennent, tu m'as donné quelque chose en quittant notre petit projet peuplé de grands.

L'amour de ces enfants qui ne me ressemblent pas. La compréhension de cette réalité qui n'est pas mienne. Les aimer un peu plus pour changer un petit quelque chose...

Et ça, je le fais pour toi, un peu.

Merci. Et félicitations pour ton Gémeaux, même si tu considères sûrement que c'est LEUR prix à eux.

xx