Il y a quelques mois, quelques années dans ma vie en accéléré, je voulais voir un vagin et j'ai vu un pénis. Il y a quelques mois, quelques années dans ma vie en accéléré, je voulais une troisième fille et j'ai eu un fils.L'Héritier est débarqué dans notre vie l'air de dire: "Ne vous en faites pas, je prendrai une toute petite place..." et a agi comme tel. Souriant, discret, avec un pleur qui attire l'empathie tellement il semble nous raconter ses peines plutôt que les crier, même le plus amer des parents aurait craqué. Comme s'il voulait nous convaincre que même s'il n'était pas ce que l'on espérait, il saurait s'insérer dans notre petit zoo.
Et moi, qui aime bien me mettre une tonne de pression sur les épaules, j'ai ressenti une fois de plus la crainte de l'inconnu, la peur d'être un modèle inadéquat pour lui. Comment montrer à un garçon à devenir un homme lorsque nos seules références sont bourrés de clichés cinématographiques?
Il y a quelques semaines, quelques mois dans ma vie en accéléré, il m'a souri.Il y a quelques semaines, quelques mois dans ma vie en accéléré, il m'a séduit.
Dans son sourire et ses yeux ouverts bien grands se lisent un bonheur sans fin. Un bonheur qui n'a rien à foutre des soucis, des grosses journées, des frustrations et des motons dans la gorge. Quand il est heureux, l'Héritier illumine ma journée par un grand sourire matinal avant que je quitte pour l'école. Et il m'ammène mille questions du même coup qui se battent pour reprendre toute l'espace dans mon cerveau souvent brumeux: quand ai-je perdu cette facilité à rire et à m'émerveiller devant ce qui m'entoure? Quand ai-je laissé les problèmes du quotidien l'emporter sur la beauté qu'il renferme?
Il y a quelques nuits, quelques jours dans ma vie en accéléré, il a pleuré et n'a pas dormi.Il y a quelques nuits, quelques jours dans ma vie en accéléré, je l'ai accompagné.
L'Héritier, qui dort toujours paisiblement, nous a rappellé que même s'il était un bébé super, il était quand même un bébé cette semaine. Deux nuits, un grand total de 7 heures de sommeil, les journées à traverser comme des triathlons, sans se demander quand on arrive mais rester concentré sur chaque pas, chaque coup de roues et une grande fatigue s'est emparé de nous. Et il est parti à la clinique avec sa maman. Et on l'a envoyé à l'hôpital pour des tests plus approfondis. Et il a été manipulé: ouvre la bouche, regarde les oreilles, passe des radiographies pulmonaires couché sur le côté, le cou immobilisé, pique sur la tête car c'est le seul endroit où ils peuvent voir un canal, pas de veine!
Il était bien accompagné, armé de Blondinette devant l'attaque viral. Moi, j'étais avec mes filles, inquiet mais conscient que pour la Loutre et mon Koala, le quotidien devait continuer. J'ai fait de mon mieux pour remplacer mon amour. J'ai fait du bon travail mais elle n'est tout simplement pas remplaçable. C'est aussi simple que ça. Elle a un don pour l'amour et l'harmonie dans la maisonnée que je n'ai pas.
Lorsqu'ils sont revenus pendant que moi et ma marmaille écoutions le hockey, j'ai souri à ma blonde. J'avais tout fait pour lui offrir le repos bien mérité. Et mon Héritier qui dormait dans son habit blanc qui lui donnait la forme d'un flocon, les yeux étanches pour éviter les débordements qui avaient eu lieu toute la journée. Il était beau. Calme et beau. La journée avait été difficile et il se reposait, attendant le lendemain, reprenant ses forces pour combattre à nouveau son virus.
Parfois, je me trouve ridicule à travers mes inquiétudes de parent. Et ceux qui luttent contre la maladie toute leur vie? Comment font-ils? Peut-être qu'ils ne font que se rendre jusqu'au soir, une étape à la fois, et qu'ils se couchent pour affronter le lendemain du mieux qu'ils le peuvent. Et ils se foutent pas mal de savoir ce qu'est un homme. Ils se contentent d'être vivants.Tiens, ça me va à moi aussi...